dimanche 17 mars 2013

Distance - Anne Cuneo


Il y a entre toi et moi
L’espace bleu d’eau
Mouillé de soleil
Traversé de cris d’oiseau
De vrombissements de vie

Il y a entre toi et moi
Écumant sur mon oreiller
Un océan de  vagues
Elles emportent en se retirant
Le secret des coquillages

Il y a entre toi et moi
Des tempêtes terribles
Des voiles déchirées
Des hommes agonisants
Sous le ciel naufragé

Mon vieux - Daniel Guichard


Dans son vieux pardessus râpé
Il s’en allait l’hiver, l’été
Dans le petit matin frileux,
Mon vieux.

Y avait qu’un dimanche par semaine
Les autres jours, c’était la graine
Qu’il allait gagner comme on peut,
Mon vieux.

L’été, on allait voir la mer
Tu vois, c’était pas la misère
C’était pas non plus le paradis,
Hé oui, tant pis.

Citation d’Arnaud Amalric



« Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens. »

Citation de Paul Klee

Paysage du passé (1918)

« Apprends à regarder plus loin que les apparences, pour atteindre la racine des choses. »

vendredi 8 mars 2013

Chaque jour de plus - Michel Fugain


À quoi ça sert l’amour
Si c’est un aller sans retour
Y a plus que du vide à la place
Mais que veux-tu que j’en fasse ?

À quoi ça sert la vie
Quand on meurt petit à petit
S’il ne reste plus que l’absence
À qui veux-tu que je pense ?

Je jure si tu reviens
Je saurai être heureux d’un sourire
Je jure que j’apprendrai à écrire
Tous les mots pour le dire

Art poétique - Paul Verlaine


De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l’Impair
Plus vague et plus soluble dans l’air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.

Il faut aussi que tu n’ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise :
Rien de plus cher que la chanson grise
Où l’Indécis au Précis se joint.

C’est des beaux yeux derrière des voiles,
C’est le grand jour tremblant de midi,
C’est, par un ciel d’automne attiédi,
Le bleu fouillis des claires étoiles !

Le piège alsacien - Jean- Philippe Arrou-Vignod


À la villa, on a une voisine.
Elle s’appelle Mme Schwartzenbaum et son jardin est séparé du nôtre par une haie de canisses tellement usée qu’on dirait les fanons de baleine séchés du Musée océanographique.
-Les enfants, a dit maman un après-midi, allez vous laver les mains et vous redonner un coup de peigne. Nous allons rendre une visite de courtoisie, et je veux que vous fassiez bonne impression.[…] Nous sommes nouveaux dans le quartier, a ajouté maman. Ce sont des choses qui se font entre voisins bien élevés.[… ]
-Ze peux apporter mon pistolet à fléssettes ? a demandé Jean-E.
-Hors de question, a dit maman. Je compte sur vous pour être sages et polis ou ça va barder en rentrant.

lundi 4 mars 2013

Les oies sauvages - Guy de Maupassant


Tout est  muet, l’oiseau ne jette plus ses cris.
La morne plaine est blanche au loin sous le ciel gris.
Seuls, les grands corbeaux noirs, qui vont cherchant leurs proies,
Fouillent du bec la neige et tachent sa pâleur.

Voilà qu’à l’horizon s’élève une clameur ;
Elle approche, elle vient, c’est la tribu des oies.
Ainsi qu’un trait lancé, toutes, le cou tendu,
Allant toujours plus vite en leur vol éperdu,
Passent, fouettant le vent de leur aile sifflante.

Le guide qui conduit ces pèlerins des airs
Delà les océans, les bois et les déserts,
Comme pour exciter leur allure trop lente,
De moment en moment jette son cri perçant.

dimanche 3 mars 2013

Dix petits nègres - Agatha Christie


[…]

Le dîner touchait à sa fin.
La chair avait été excellente, les vins parfaits. Rogers s’acquittait admirablement de son service.
Tous les convives étaient de bonne humeur et les langues commençaient à se délier.
Mr. le juge Wargrave, attendri par le délicieux porto, devenait spirituel et pétillant d’ironie ; le docteur Armstrong et Tony Marston l’écoutaient avec plaisir, Miss Brent bavardait avec le général Macarthur ; ils s’étaient découvert des amis communs. Véra Claythorne posait à Mr.Davis des questions très pertinentes sur l’Afrique du Sud. Mr. Davis connaissait ce sujet à fond. Lombard suivait leur conversation. Une ou deux fois, il leva brusquement les yeux et ses paupières se rétrécirent. De temps à autre, il promenait discrètement son regard autour de la table et étudiait les autres convives.
Soudain, Anthony Marston s’exclama :
-C’est drôle, ces petites statuettes, hein ?
Au centre de la table ronde, sur un plateau de verre, étaient placées de petites figurines en porcelaine.
-Des nègres, dit Tony. L’ìle du Nègre. Voilà d’où vient l’idée, je suppose.
Véra se pencha en avant.
-En effet, c’est amusant. Combien sont-ils ? Dix ?
-Oui…il y en a dix.
Véra s’exclama :
-Ils sont comiques. Ce sont les dix négrillons de la chanson de nourrice. 1Dans ma chambre à coucher, elle est encadrée et suspendue au-dessus de la cheminée.